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L’écocide, un risque juridique de plus pour les entreprises

Un arbre mort devant une usine industrielle.
© Heiko119 via iStock

L'inscription de l'écocide dans la réglementation européenne constitue une menace pour les entreprises qui ne se préoccuperaient pas de l’environnement. Néanmoins, les contrôles déjà en place sont aujourd’hui trop peu dissuasifs.

Le 29 mars 2023, le Parlement européen a proposé d’inscrire le principe d’écocide dans la loi de l’Union européenne (UE). La directive a été adoptée à l’unanimité en commission et doit maintenant être discutée avec les États membres et la Commission européenne. Un nouveau risque qui pèse sur les entreprises ?

En France, le délit d’écocide existe déjà. Il a été intégré dans le Code de l’environnement grâce à la loi résilience de 2021, plutôt que dans le code pénal. Actuellement, le délit d’écocide consiste à intentionnellement commettre certains actes préjudiciables à l’environnement.

D’une qualification exceptionnelle à une réglementation universelle

Pour l’Europe, un écocide comprend tous les délits environnementaux considérés comme les plus graves. « La conduite d’activité économique même en temps de paix peut mener à un écocide, une infraction pénale particulièrement grave pour l’environnement est constituée », explique Carine Le Roy Gleizes, avocate en droit de l’environnement au sein du cabinet Foley Hoag. Initialement, la notion d’écocide « est apparue dans les années 70 lorsque l’atteinte volontaire à l’environnement a été utilisée comme un instrument de guerre ».

Aujourd’hui, ce concept décrit un ensemble de comportements causant des dommages graves et étendus, à long terme ou irréversibles. « L’écocide est fait référence à une situation exceptionnelle qui n’arrive pas tous les jours », développe l’avocate.

La qualification d’écocide en tant que crime nécessite encore une réflexion approfondie à Bruxelles. Cela dépendra de l’évolution des travaux autour de la directive. « Dans le futur et selon la définition qui en sera donnée au niveau européen, l’écocide pourrait s’appliquer plus largement aux activités économiques », estime Carine Le Roy Gleizes.

Une meilleure anticipation des risques par les entreprises

En 2021, la première plainte européenne pour écocide a été déposée par une famille de Grézieu-La-Varenne. Elle avait découvert une importante pollution des sols à l’endroit où se trouvait leur maison, malgré son emplacement dans un environnement résidentiel a priori préservé. Deux notaires et une société immobilière ont été condamnés, cependant pas pour écocide mais pour tromperie. Le résultat de la difficulté à prouver le délit d’écocide.

Certaines industries devront néanmoins profondément modifier leurs activités pour éviter de courir le risque d’un procès. L’anticipation et la gestion du risque deviendront des éléments clés pour réduire l’exposition des entreprises aux accusations d’écocide et pour maintenir une image de responsabilité environnementale. « Les entreprises doivent désormais gérer des risques tant sur le plan pénal que sur le plan réputationnel ; il faut en outre qu’elles soient attentives au devoir de vigilance, qui existe déjà en France mais qui concernera certainement davantage d’entreprises une fois la proposition de directive européenne adoptée à cet égard », décrypte Carine Le Roy Gleizes.

Les entreprises devront auditer leurs actions pour garantir leur conformité à la réglementation d’écocide, prendre des mesures correctives si nécessaire et dialoguer avec toutes les parties prenantes, y compris les administrations, les collectivités, les associations et les employés.

Améliorer les contrôles

L’application d’une telle réglementation sur l’écocide implique une gestion administrative pour contrôler les entreprises. Mais l’idée n’est pas d’ajouter des contraintes mais plutôt d’augmenter l’efficacité des moyens préexistants. « Trop de réglementation tue la réglementation », explique encore Carine Le Roy Gleizes. « On doit privilégier la sélectivité pour garantir une mise en œuvre optimale. Il faut trouver un équilibre entre la nécessité de réguler et la capacité des parties prenantes à respecter les réglementations. »

En France, les préfets et les Directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) assurent le contrôle des installations industrielles. Et de sanctionner les entreprises en cas de non-respect de la réglementation environnementale. Sauf que les contrôles sont peu suivis d’effet, regrette l’avocate. « Le problème du droit de l’environnement en France n’est pas le manque d’obligations réglementaires », constate Carine Le Roy Gleizes. « Le Code de l’environnement ne cesse de s’étoffer. Le problème, c’est l’effectivité des poursuites. »

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