La pandémie, les confinements et les retours parfois compliqués au travail l’ont confirmé : en termes de santé, physique ou psychologique, nul n’est épargné. International SOS, dont la mission est de maîtriser les risques de santé et de sécurité au sein des organisations, constate que l’épisode a permis de se rendre compte du manque de conscience des entreprises sur le sujet. « Pourtant, lorsqu’elles prennent ce sujet à bras-le-corps, leurs salariés mesurent les bénéfices que cela apporte », assure le docteur Philippe Guibert, directeur médical du groupe, dans un livre blanc sur les nouveaux enjeux de la santé en entreprise.
Le travail, ce n’est plus vraiment la santé
En 2022, l’Ifop révélait que 50% des gens estimaient que leur emploi avait des conséquences négatives sur leur santé physique et 60% qu’il avait des conséquences négatives sur leur santé mentale. Les problèmes les plus souvent rapportés sont une fatigue générale, des maux de tête, des troubles musculaires ainsi qu’une fatigue visuelle. Côté santé mentale, un accroissement perçu de la charge de travail couplé à un contexte anxiogène (guerre en Ukraine, inflation, dérèglement climatique), engendrent détresse psychologique, stress et burn-out à répétition, indique le livre blanc.
Absences à répétition
La conséquence directe de ce mal-être ? Un taux d’absentéisme record. En 2022, près d’une personne sur deux s’est absentée au moins une journée au travail. Le baromètre d’AG2R La Mondiale souligne une hausse du taux d’absentéisme en France de 21% entre 2019 et 2023. Depuis 2011, le nombre moyen de jours d’absence par an et par personne est passé de 14 à 24,5. En ce qui concerne les absences liées à la santé mentale, International SOS les mesure à hauteur de 12 milliards de jours de travail par an. En 2018, l’Institut Sapiens estimait que l’absentéisme constituait un manque à gagner de 108 milliards d’euros par an (en comptant les salaires versés aux personnes absentes, le temps de travail supplémentaire de leurs collègues et les dépenses liées aux prestataires externes). Des chiffres qui ne font qu’augmenter et qui soulignent l’urgence pour les entreprises de se saisir du sujet.
Oser parler de santé
International SOS regrette que la santé n’ait qu’une place de second plan lorsqu’il s’agit de piloter la performance de l’entreprise. Pourtant, en France, l’employeur a une obligation légale et morale d’assurer et de protéger la santé physique et mentale de ses équipes (même si, depuis 2015, la Cour de Cassation considère cette obligation de sécurité comme une obligation de prévention).
Pour les équipes d’International SOS, il faudrait instaurer un profond changement de la culture d’entreprise pour faire de la santé au travail une valeur partagée. « Elle doit devenir un critère clé de décision, à tous les niveaux, estime Philippe Guibert. Le sujet doit être porté par les dirigeants, les ressources humaines, la direction juridique, la communication interne ou les représentants du personnel. »
Pour ce faire, la première étape est de lever les tabous – notamment concernant les maladies longues, comme les cancers, et la santé mentale. Une enquête de l’agence européenne pour la sécurité et la santé au travail révèle que deux tiers des gens en France craignent que la divulgation d’un problème de santé mentale ne nuise à leur carrière.
Faire rimer santé et attractivité
Du côté des entreprises, au-delà de combler les pertes liées à l’absentéisme, se soucier de la santé de ses équipes représente un réel atout en matière d’attraction et de rétention des talents. C’est pourquoi les dirigeants ont tout intérêt à prendre publiquement la parole sur ce sujet. L’Ifop notait à ce titre que 61% des gens considéraient le bien-être au travail comme un enjeu prioritaire au sein de leur entreprise fin 2021.
Bien sûr, la prévention a aussi un coût. Mais International SOS insiste : l’argent investi dans la santé au travail est bénéfique aux entreprises. Deloitte rapporte ainsi qu’un euro investi dans un programme de formation des managers aux questions de santé mentale peut représenter un retour sur investissement allant jusqu’à 10 euros, en réduisant les coûts liés à l’absentéisme.