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Dragon Tactics : doit-on s’inspirer des entrepreneurs chinois ?

Une statue de dragon aux reflets violet sur un fond noir
© Yash Munot via Unsplash

L’idée n’a rien d’évident. Et pourtant, en ces périodes d’incertitude, les dirigeants d’entreprise occidentaux pourraient bien avoir quelques leçons à tirer de la part des entrepreneurs chinois.

« Les tactiques des entrepreneurs chinois pour mieux diriger dans l’incertitude ». Voilà le sous-titre de l’ouvrage Dragon Tactics (éditions Dunod) co-écrit par Sandrine Zerbib. Sa maîtrise du sujet, elle la doit à plus de 25 ans d’expérience dans le secteur de la consommation en Chine. Ancienne présidente d’Adidas-Chine et du groupe Dongxiang, elle dirige aujourd’hui le groupe d’e-commerce chinois Full Jet. Pour elle, pas de doute : les entrepreneurs occidentaux doivent s’inspirer des entrepreneurs chinois. Quitte à tordre le cou aux idées reçues.

Une adaptation permanente au changement

Ce que retient avant tout Sandrine Zerbib de l’entrepreneuriat chinois, c’est l’adaptation permanente au changement. Depuis la sortie de la révolution culturelle, les entrepreneurs chinois sont obligés de naviguer dans l’incertitude. « Les réglementations et les habitudes des consommateurs changent à une vitesse qui n’est visible nulle part ailleurs », explique l’experte. Résultat : les entreprises s’adaptent, progressivement, sans forcément formaliser ou théoriser le changement. « Les dirigeants créent des méthodes de management adaptées aux périodes de doute auxquelles nous sommes confrontés. » Ainsi, la tendance est au « re-planning » permanent. Plutôt que de fixer des objectifs à 3 ans, il règne dans les entreprises chinoises une forme d’immédiateté pour plus d’efficacité. « Les grands patrons – qui sont souvent les fondateurs – lisent le terrain, en direct, et communiquent de façon très ouverte avec l’ensemble de leurs salariés, quel que soit leur niveau, au cours de sessions dédiées à la résolution de problèmes. Ils peuvent ainsi comprendre le réel des équipes et des consommateurs. Il n’y a pas de lecture intermédiée, comme on peut en vivre dans nos structures pyramidales. »  

Le rôle du chef

Bien sûr, tout n’est pas duplicable. Les sociétés occidentales sont plus individualistes que les sociétés asiatiques, de manière générale. « Il règne un aspect très collectif du système, qui se traduit dans les entreprises par une forme d’entrain, de respect qui est perdu – voire inconnu – en Occident », estime Sandrine Zerbib. L’approche du « chef » est aussi très différente de ce que l’on recherche en France, par exemple. « Chez nous, le chef va apparaître comme un coordinateur démocrate. En Chine, c’est un personnage central, une forte inspiration pour ses salariés. Il doit imposer une vision presque patriarcale à ses équipes, avec l’objectif de les protéger. C’est une démarche jugée très positive, mais qui est décriée en Occident. »

Valoriser l’observation

Le trait le plus distinctif des entrepreneurs chinois, pour Sandrine Zerbib, c’est la valorisation de l’observation. « Il y a une attention toute particulière portée à la data. Les entrepreneurs chinois apportent de la science à leur observation. » Elle oppose les conceptions du génie à l’occidentale et à la chinoise. « Nous sommes élevés dans l’idée qu’un génie est quelqu’un qui pense bien, qui a la tête bien faite. En Chine, c’est plutôt quelqu’un qui sait observer son environnement pour en tirer des opportunités. Cette capacité d’observation permet de comprendre les micro-tendances du marché, et de réagir extrêmement rapidement. » À ce titre, elle insiste : il convient de différencier « concept » et « observation ». « Nos entreprises occidentales basent de nombreuses décisions sur des concepts. C’est-à-dire qu’elles s’imposent des grilles de lecture dans lesquelles elles forcent le réel. L’approche chinoise est absolument inverse : il existe une observation ouverte de ce qui se passe, dont découlent une analyse, puis des actions. »

Quid des dérives ?

Alors que les médias titrent régulièrement sur les dérives (voire les tragédies) du « management à la chinoise », n’est-il pas osé de vouloir s’en inspirer ? Difficile d’ignorer les accusations d’esclavage, ou de maltraitances qui ont eu lieu pendant la pandémie, par exemple. « Le droit du travail évolue très rapidement. Il devient protecteur, moins que chez nous, certes… mais les choses bougent dans le bon sens« , témoigne Sandrine Zerbib. Elle assure que les grands groupes le comprennent, poussés par la jeunesse. « Les jeunes ne veulent plus travailler comme leurs parents. Avant la pandémie, ils n’ont connu aucun problème : le rythme 9-9-6 (travailler de 9h à 21h, 6 jours par semaine, ndlr) ne trouve pas grâce à leurs yeux. Il reste des abus, notamment envers la main d’œuvre qui vient de régions pauvres, reconnaît-elle. Mais lorsque l’on regarde ce qui se passe dans les villes ou les grandes entreprises, ces dérives sont en voie de disparition, même s’il est vrai que la valeur travail reste plus importante que chez nous. » Elle constate que les liens émotionnels, « quasi familiaux », qui sont tissés au sein des entreprises chinoises permettent de supporter une certaine forme de dureté. « La vraie difficulté, ce ne sont pas les horaires à rallonge, mais le manque d’émotions dans le cadre de l’entreprise », conclut-elle.

Mélanie Roosen & Géraldine Russell

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