Le made in France a ses vertus. Pour l’économie tricolore, c’est la garantie que l’emploi restera ancré sur le territoire. Les entreprises aussi y trouvent leur compte, notamment en termes de marketing. Même les start-up s’y mettent. « Le made in France est un indispensable auquel nous tenons particulièrement », soulignait l’an dernier Franck Lebouchard, le PDG de Devialet, auprès de nos collègues d’Actu.fr.
Les start-up industrielles sont de plus en plus nombreuses à privilégier une production locale. « Produire en interne et localement permet de sécuriser le produit et de maîtriser l’innovation », analyse Roxane Quenin, responsable des achats de la start-up grenobloise Caeli Energie, qui produit un refroidisseur sans fluide frigorigène. Au-delà de sa chaîne de production, l’entreprise a fait le choix de privilégier des matériaux français ou européens. « C’est le même principe qu’acheter ses légumes auprès des producteurs plutôt qu’en supermarché : quand on ajoute des intermédiaires, on ajoute des filtres. Et il est alors moins facile de contrôler la qualité du produit ou d’évaluer la performance RSE des fournisseurs. » Le choix du made in France est donc aussi celui de la haute qualité.
Petits besoins VS gros fournisseurs
S’approvisionner localement permet une certaine réactivité, chère aux start-up. « Le développement de notre produit se fait dans un temps relativement court par rapport aux standards du marché car nous itérons régulièrement. C’est une contrainte, reconnaît Roxane Quenin. Nous ne pouvons pas attendre que le canal de Suez se débloque pour être livré. » Un impératif qui peut aussi générer quelques tensions avec les fournisseurs locaux, parfois peu rompus à l’irrégularité des cycles de commandes des start-up.
Sourcer ses matières premières localement présente un autre défi pour des entreprises qui ne disposent pas des moyens des grands groupes. Et n’ont pas non plus les mêmes besoins. « Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous offrir de flexibilité avec les fournisseurs, constate l’experte. Nous passons de petites commandes auprès de fournisseurs habitués à livrer des pièces par centaines de milliers. » Pour autant, pas question de se laisser aller au fatalisme face à des fournisseurs aujourd’hui en position de force. « Nos besoins seront complètement différents demain, avec l’industrialisation de la production. Nous devons donc structurer dès à présent la chaîne d’approvisionnement dont nous aurons besoin. »
Sourcer localement… quand c’est possible
Le sourcing local se heurte aussi à la délocalisation de certaines filières, qui ont disparu de France voire d’Europe. « Pour assurer le développement, nous avons parfois besoin de déléguer à des partenaires de confiance l’industrialisation de nos produits, afin de nous concentrer sur notre cœur de métier. Dans notre secteur, en France, de tels partenaires sont malheureusement rares », regrettait ainsi Franck Lebouchard. Caeli Energie pâtit aussi de l’hégémonie asiatique en matière de composants électroniques. Et est obligée de chercher ses pompes en-dehors du Vieux Continent, la filière ayant disparu au fil des délocalisations.
Les start-up s’attellent donc à multiplier les solutions. Pour son refroidisseur, Caeli Energie a développé certaines pièces, qui n’existaient pas sur le marché, avec des partenaires rhône-alpins. La présence de nombreuses start-up dans la région facilite aussi les relations, avec des interlocuteurs plus habitués à travailler avec des sociétés innovantes. Autre piste : le recyclage de matières. Non seulement cela répond aux exigences environnementales de l’entreprise mais, à terme, cela peut constituer une source intéressante d’approvisionnement. « Nous intégrons la notion de cycle de vie du produit dès sa conception, se réjouit Roxane Quenin. C’est plus facile de créer avec l’idée que le produit soit recyclable plutôt que de chercher comment le recycler une fois la conception achevée. »