5 euros. C’est le montant du malus qui pourrait s’appliquer aux produits d’ultra-fast fashion si la proposition de loi du jeune député Les Républicains Antoine Vermorel-Marques était adoptée. Né à Roanne, ce fils d’éleveur laitier constate au quotidien les dégâts du déclin de l’industrie textile. « Toutes les familles de ma circonscription ont été touchées par les délocalisations massives de l’industrie textile en Chine, dans les années 80 et 90. Aujourd’hui, 2 tendances s’opposent. D’un côté, certaines entreprises réussissent à refaire du made in France. De l’autre, les géants de l’ultra-fast fashion ne cessent de gagner des parts de marché. »
Lutter contre les effets délétères d’une certaine mode sur le climat
Le député rencontre régulièrement ceux qui souffrent en premier lieu de cette nouvelle forme de compétition : les acteurs de l’industrie textile en France. Il partage auprès d’Intelekto les inquiétudes des membres d’En Mode Climat, qui réunit plus de 500 entreprises. Ce collectif milite pour une législation contraignante afin que le secteur « réduise significativement ses émissions de CO2 ». Le collectif rappelle que près de 70% des émissions du secteur textile proviennent de l’énergie consommée par les machines qui transforment la matière en vêtement dans les lieux de production. C’est-à-dire « majoritairement des pays d’Asie au mix énergétique fortement carboné ».
Mais ce n’est pas tout, alerte Antoine Vermorel-Marques. Il faut ajouter à l’équation les émissions des modes de transport utilisés pour acheminer ces produits – « l’avion, pour assurer une livraison rapide » – ainsi que les déchets produits par cette mode « jetable ». Aujourd’hui, 20% de la pollution des eaux à l’échelle planétaire est causée par l’industrie textile, rappelle The Good Goods. « Nous parlons de vêtements éphémères, insiste le député. Ils s’abîment à peine portés et finissent dans des décharges à ciel ouvert. Dans la mesure où ils sont composés de matières pétrochimiques, ils ne sont pas recyclables. »
Un malus pour les mauvais élèves, un bonus pour les bons
Dans sa proposition de loi, Antoine Vermorel-Marques propose d’instaurer « une pénalité maximale d’un montant de 5 euros par produit lorsque le producteur met sur le marché plus de 1 000 modèles par jour » et ne dispose d’aucun point de vente physique en France. Sans les nommer directement, le texte vise certaines marques bien connues du grand public. Difficile de ne pas penser à Shein, qui référence chaque jour entre 7 000 et 8 000 nouveaux modèles. Et que le député n’hésite pas à dénoncer sur son compte TikTok.
TikTok – Antoine Vermorel-Marques@antoinevermorel42 🛑 Les vêtements à 2€ qui arrivent en avion, contiennent des substances nocives pour la santé et finissent sur les plages en Afrique, c’est non ! Je dépose à l'Assemblée nationale une proposition de loi pour instaurer un bonus-malus afin de pénaliser les marques et pour encourager les démarches plus vertueuses ♻️ #shein#sheinhaul#ecologie#fastfashion#stopshein#pourtoi#fyp @lookbookaly @menezangel_ @loufitlove @lila_drila @cilia.ghass @tifanywallemacq @veronika_cln @lia__toutcourt @iamm_mae.e@IAMM_MAE.E ♬ son original – antoinevermorel
« C’est le principe du pollueur-payeur. Le malus doit financer le bonus et pour cela les producteurs vont avoir 3 possibilités. La première, c’est de prendre le malus à leur charge. La seconde, c’est de le répercuter sur le consommateur. La troisième, c’est de changer de mode de production. Le jour où ces acteurs produiront en France, il n’y aura plus de problème », assure-t-il.
La seconde possibilité évoquée par Antoine Vermorel-Marques a fait grincer des dents certains commentateurs. En pleine inflation, est-il raisonnable de proposer une augmentation des prix de l’habillement ? « Je cherche à réorienter les porte-monnaie. Tout le monde s’habillait avant Shein, qu’on ne me fasse pas croire que c’est la seule solution ! Il existe des friperies, des brocantes ou des solutions plus récentes comme Vinted ou Leboncoin. La qualité des vêtements vendus en seconde main est meilleure que celle de ceux qui sont vendus sur les plateformes visées par la proposition de loi, se défend-il. Et l’impact sur l’environnement est bien moindre. »