Vers un new deal de l’impact ? C’était la proposition portée par plusieurs participants au Sommet de la mesure d’impact, qui s’est tenu le 13 février 2023 à l’Assemblée nationale. Le point de départ de la réflexion est clair. Pour avancer, l’investissement et la finance à impact doivent se mesurer. Or, pour l’instant… c’est un peu flou.
D’un côté, il y a les optimistes. Comme Jean-Marc Borello, président du directoire du Groupe SOS. « On peut trouver un consensus. Mais il faut le chercher ensemble. L’urgence est donc de réunir l’ensemble des acteurs, et de travailler vite car le temps est compté. Mesurer, c’est savoir », assène-t-il. De l’autre, les pragmatiques. « La mesure d’impact doit avoir un objectif. Celui de distinguer, singulariser et reconnaître les entreprises qui font des efforts importants et celles qui sont plutôt dans le déclaratif ou le greenwashing », alerte Pascal Demurger, directeur général de la Maif.
Enfin, il y a ceux qui choisissent un parti pris, tranché, en attendant que tout le monde se mette d’accord. C’est le cas de Guillaume-Olivier Doré, qui a récemment co-fondé Impact Source. Ce fonds de fonds à impact se dirige dans une direction bien précise : « l’impact transformatif ». L’objectif : ne plus sacrifier le rendement sur l’autel de l’impact, et ne pas chercher la perfection – plutôt l’évolution. « Aujourd’hui, il est facile d’investir dans des fonds vertueux car ils sont identifiés, classés. Mais ce dont nous sommes persuadés, c’est que le bénéfice est plus grand lorsque l’on accompagne la transformation », nous explique Guillaume-Olivier Doré. Ainsi, Impact Source cherche à financer non pas les fonds qui cochent toutes les cases mais ceux qui, dans leur intentionnalité, veulent accompagner les entreprises sur la voie de l’impact. « Ce qui compte c’est plutôt la courbe d’évolution de l’engagement d’une entreprise. »
Faire face au flou des définitions de la finance à impact
Cette posture permettrait de faciliter la vie des institutionnels. « Ils ont aujourd’hui un manque crucial de visibilité sur ce qu’est l’impact, en particulier en matière d’investissement. Les normes, les critères, les grilles en tout genre se multiplient sans uniformisation », poursuit Guillaume-Olivier Doré. Avec son approche basée sur des critères solides – « établis par le Groupe SOS », partenaire d’Impact Source – la structure promet de faire remonter l’information facilement, et de façon lisible, aux investisseurs. « Nous avons une approche de grossiste nécessaire », estime l’expert.
Surtout après les difficultés rencontrées par les fonds article 9 ces derniers mois. Depuis 2019, le Parlement européen a mis en place le règlement SFDR (pour Sustainable Finance Disclosure Regulation) qui détaille les informations à fournir en matière de développement durable par le secteur de la finance. Ce règlement permet de classer les fonds en fonction de leurs engagements. Ainsi, les fonds classés article 9 doivent afficher de manière explicite un objectif d’investissement durable. Or, fin 2022, de nombreux fonds article 9 ont été déclassés vers l’article 8. Celui-ci demande l’inclusion des caractéristiques environnementales ou sociales dans le cadre d’une stratégie d’investissement plus large. En cause : une définition plus stricte des autorités de régulation pour être classé article 9. « La norme SFDR évolue. Ce qu’il s’est passé a été un choc pour tout le monde. Les institutionnels qui avaient investi des millions dans ce qu’ils pensaient être des fonds article 9 se sont retrouvés très démunis », analyse Guillaume-Olivier Doré.
Passer au « capitalisme durable »
Face aux voix qui voudraient repenser totalement le système économique pour un impact à grande vitesse, Guillaume-Olivier Doré se veut plus mesuré. « Le capitalisme est aujourd’hui le meilleur système pour faire de l’impact. Sans casser le modèle économique mondial, ce qui serait de toute façon impossible, il faut tendre vers un capitalisme durable. » Il souhaite ainsi que les critères de durabilité deviennent des critères économiques.
Le problème ? Il juge compliqué de légiférer sur le sujet. Selon lui, ce pourrait même être contre-productif. « Toute la question de la normalisation, même si elle permet de faire émerger de nombreuses initiatives, a tendance à enfermer. Or, le monde est mouvant. Ce qui est impactant aujourd’hui le sera moins demain. Enfermer les acteurs économiques privés dans des cadres trop serrés peut être néfaste pour l’innovation », conclut-il.