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Partage de la valeur en entreprise : les dispositifs existent mais se heurtent à de nombreux freins

Un panneau de circulation "Stop"
© Joshua Hoehne via Unsplash

Cannibalisation entre les dispositifs, complexités administratives, inégalités… le partage de la valeur en entreprise n’est pas une mince affaire ! Pourtant, depuis les années 50, les initiatives sur le terrain se multiplient.

Avec les crises à répétition (sanitaires, géopolitiques, économiques), les difficultés s’accumulent pour une bonne partie de la population et les entreprises. L’inflation attise les tensions, et pousse syndicats et patrons à tenter de trouver des solutions. L’une des pistes avancées et discutées est la mise en place de dispositifs de partage de la valeur. En France, les principaux sont la participation (obligatoire à partir de 50 salariés), qui prévoit la redistribution d’une partie des bénéfices aux salariés, et l’intéressement (facultatif), qui permet à toute entreprise d’associer les salariés à des objectifs de performance.

En 2019, le Trésor se félicitait de l’exemplarité française : avec près de 40% des entreprises proposant un dispositif de partage de la valeur à plus de 20% de leurs salariés, le pays était le deuxième de toute l’Europe (derrière la Slovénie) sur le sujet. De bons résultats en apparence, qui cachent en réalité de grandes inégalités.

Dans le partage de la valeur, c’est la taille qui compte

L’étude « Participation, intéressement et épargne salariale en 2020 » de la Dares, citée dans le rapport sur le partage de la valeur publié en juillet 2022 par l’Institut Montaigne, rappelle certes que plus de 60% des salariés bénéficient d’un accord de participation dans les entreprises de plus de 100 personnes, mais que cette proportion chute à 39% dans les structures qui en comptent 50 à 100, et à 5% pour celles qui en comptent 10 à 50. Une tendance que suit la répartition du nombre d’accords d’intéressement. Le taux de couverture des équipes dans les entreprises de plus de 100 personnes dépasse 35% (et gravite autour de 70% dans les entreprises de plus de 1 000 personnes) mais n’atteint que 25% dans les entreprises de 50 à 100 salariés, et 12% dans les entreprises de 10 à 50 salariés.

Un partage de la valeur difficile à mettre en place

Lisa Thomas-Darbois, chargée d’études à l’Institut Montaigne a travaillé sur le rapport. Elle explique que ces inégalités sont le reflet d’une complexité administrative pour mettre en place ces dispositifs, ainsi que d’une méconnaissance de l’écosystème. « Une entreprise qui emploie plus de 1 000 personnes est bien accompagnée. Elle est entourée d’avocats fiscalistes, de juristes, de banquiers… Autant de profils qui ont les moyens de rédiger des accords. A contrario, le dirigeant d’une petite structure pourra trouver la mise en place de tels dispositifs difficile, chronophage, voire dangereuse d’un point de vue juridique. »

Elle rappelle que diriger une petite entreprise, c’est aussi bien souvent endosser plusieurs rôles. Celui de chef d’entreprise, de comptable, de gérant, de RH… et qu’il est parfois impossible d’ajouter une tâche supplémentaire à sa journée, surtout si celle-ci n’a rien d’obligatoire. 

Des dispositifs qui fonctionnent… mais qui se cannibalisent

Un autre moyen d’expliquer ces inégalités, c’est la multiplication des dispositifs. Lisa Thomas-Darbois pointe du doigt la prime Macron, établie en 2019, et depuis août 2022 renommée Pepa (« prime exceptionnelle de pouvoir d’achat »). « Elle permet aux employeurs de verser aux salariés une somme, exonérée de cotisations et non-imposable, assez importante… sans obligation d’inscription dans la durée. Pour les patrons, c’est un choix parfois plus facile, qui entre en concurrence directe avec les dispositifs de partage de la valeur », estime-t-elle. Elle regrette le côté « temporaire » de la mesure, qui ne peut répondre à la crise sociale dans la durée.

Obligation vs démocratisation

Les équipes de travail du rapport se sont posé la question d’étendre les obligations en cours pour systématiser les dispositifs de partage de la valeur. « Nous nous sommes rapidement rendu compte qu’une obligation supplémentaire entraînerait une levée de boucliers, rapporte Lisa Thomas-Darbois. Cela transformerait ce qui est aujourd’hui un moment de dialogue social en un sentiment d’injustice subie. » Par ailleurs, certaines entreprises réticentes pourraient jouer sur les effets de seuil pour ne pas s’impliquer.

L’Institut Montaigne recommande plutôt à l’administration de mieux promouvoir les dispositifs. « Il faudrait que les organisations professionnelles, syndicales, et gouvernementales diffusent un message commun. » La chercheuse conseille de profiter de certaines périodes – comme celles des déclarations Urssaf, par exemple – pour mener de grandes campagnes de sensibilisation. Enfin, sans changer le cadre juridique existant, elle estime qu’il est possible de simplifier et mieux sécuriser la mise en place des accords. « Nous pourrions concevoir, à destination des patrons de petites structures, un document Cerfa simplifié que les entreprises pourraient simplement signer et déposer auprès de l’administration », conclut-elle.

Mélanie Roosen & Géraldine Russell

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