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Benoît Escher (Raise) : « La responsabilité permet de limiter les risques pour une entreprise »

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La responsabilité environnementale d’une entreprise fait désormais partie des critères scrutés par les investisseurs, qui y voient un outil de résilience.

Voir au-delà des indicateurs financiers : malgré une conjoncture économique difficile, c’est le mantra de plus en plus d’investisseurs. Au moment de la due diligence ou pour accompagner le pivot de leurs participations, les fonds n’hésitent plus à scruter de près les performances extra-financières des entreprises et notamment leur empreinte environnementale. Benoît Escher, responsable Durabilité en charge de l’ESG au sein du fonds Raise, explique l’engouement des investisseurs pour ce sujet.

« L’économie responsable et durable » fait partie de la raison d’être de Raise : concrètement, qu’est-ce que ça signifie ?

Une politique RSE ambitieuse rend les entreprises plus résilientes en limitant les risques auxquels elles font face. Une entreprise du portefeuille de Raise Impact, M2i Life Sciences, produit des alternatives écologiques et durables aux insecticides. Elle a optimisé ses processus industriels pour limiter la consommation d’eau et ainsi être capable de faire face à un stress hydrique lors des périodes de sécheresse, quand des restrictions sont prononcées. Plus on est vertueux, plus on anticipe ce type de risques.

On oppose souvent les notions de performance économique et financière et les engagements écologiques. Est-ce encore vrai aujourd’hui ?

Face à des organes de gouvernance qui réclament toujours plus de pragmatisme, il faut pouvoir leur présenter des arguments très matériels et notamment le fait qu’une stratégie RSE ambitieuse permet de créer de la valeur. Cela leur permet de voir les critères RSE comme une opportunité, par exemple pour répondre aux appels d’offres des grands groupes. La RSE est devenue un enjeu business nécessitant des standards robustes ou des labels en la matière. Les économies d’énergie sont aussi un levier d’action qui fonctionne bien, encore plus depuis le début de la crise énergétique. Cela permet de matérialiser les économies réalisées. Il y a 4 ans, les entreprises qui arrivaient à prendre 15 minutes en conseil d’administration pour évoquer leur décarbonation étaient vues comme des pionnières, des romantiques. Se préoccuper de cela était vécu comme un luxe. Aujourd’hui, ces entreprises disposent d’avantages comparatifs considérables.

Pour un investisseur, les critères environnementaux sont-ils déterminants au moment de la décision d’investissement ?

Nous essayons d’intégrer l’ESG à tous les niveaux de notre processus d’investissement : en phase d’audit et de due diligence pré-investissement, puis dans le suivi de nos participations et même à la sortie. Nous menons, quand cela est possible, des études de monétarisation d’impact qui cherchent à quantifier les gains générés pour la collectivité derrière des chiffres-clés d’impact social ou environnemental. Il s’agit de matérialiser un autre type de valeur ajoutée et montrer à un futur acquéreur que l’ESG peut constituer un levier de création de valeur, soit grâce à une stratégie d’innovation incluant des critères environnementaux et sociaux listés dans la Taxonomie Européenne, soit en rendant les chaînes de valeur des entreprises plus sobres et résilientes. Dans les 2 cas, on se rend compte que les entreprises peuvent être gagnantes à court ou moyen terme.

En quoi consiste cette méthode ?

Notre équipe ESG passe en revue tous les questionnaires de reporting remplis par nos participations, soit environ 120 indicateurs par société chaque année. Et une double vérification est faite ensuite par un cabinet extérieur. Cela nous permet de mettre le doigt sur les objectifs d’amélioration car nous disposons d’objectifs ESG pour chaque entreprise en portefeuille. Nous avons également distillé notre méthodologie de mesure et de suivi d’impact dans notre fonds Seed for Good, pour lequel nous avons adapté nos grilles de reporting et de scoring en la matière aux spécificités des entreprises en amorçage.

Que faites-vous de ces indicateurs ?

Si on veut que tout cela soit efficace, actionnable, comparable, il faut des outils modernes et capables d’être adoptés par les équipes. Nous avons besoin des nouvelles technologies pour cela. Ce qui manque au marché aujourd’hui est la capacité de benchmarker les données ESG. Les entreprises doivent pouvoir comparer leurs performances dans ce domaine. C’est pour cela que l’on a opté pour le partage, au sein du SaaS extra-financier qu’on utilise, des données ESG anonymisées des entreprises que nous accompagnons pour bénéficier d’une capacité de benchmark.

N’y a-t-il pas un risque de greenwashing dans les déclarations des entreprises ?

C’est justement pour éviter le greenwashing qu’on mesure les indicateurs ESG. Nous misons beaucoup sur notre capacité d’accompagnement et de conseil. Nous voulons sortir de l’ESG punitive pour lui donner sa chance. Nous cherchons à mesurer sans dégoûter, sans alourdir la charge administrative de nos participations, tout en tenant compte de l’inflation réglementaire. Et orienter leur modèle économique vers quelque chose de vertueux pour initier, au plus tôt, les bons procédés d’innovation afin de créer de la valeur.

Quel est le prochain défi aujourd’hui pour les investisseurs, comme Raise, qui souhaitent s’engager pour davantage de responsabilité ?

En matière d’écologie, il y a une thématique qui n’est pas assez mise en avant, c’est la biodiversité. On parle beaucoup des émissions carbone mais la biodiversité décline à une vitesse affolante. Raise prend cela en compte dans son analyse et son reporting mais nous manquons d’indicateurs simples et universellement admis pour suivre l’impact des investissements sur la biodiversité. C’est en train de changer : par exemple, Carbone 4 et le Muséum National d’Histoire Naturelle travaillent sur une méthodologie de certificats liés à la préservation de la biodiversité. Cela préfigure une petite révolution dans le secteur.

Biographie

Titulaire d’un master en économie managériale et industrielle, qu’il complète par une formation vinicole, Benoît Escher commence sa carrière dans l’univers du vin, notamment en tant que responsable régional de la plateforme de distribution de vins et spiritueux Plugwine. En 2016, il prend la direction commerciale de l’entreprise et est sensibilisé par les vignerons qu’il rencontre aux enjeux environnementaux. 3 ans plus tard, il lance le média Green Shaker, dédié aux entreprises actrices de la transition écologique, avant de rejoindre le fonds Raise Impact en tant que responsable mesure et management de l’impact. Début 2022, il prend la tête de l’équipe durabilité et ESG qui supervise l’ensemble des véhicules d’investissement de Raise.

Mélanie Roosen & Géraldine Russell

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