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Private equity : des durées d’investissement trop courtes ?

Un sablier avec du sable rouge
© Pixabay

Alors qu’ils apparaissent comme des investisseurs de long terme, les fonds de capital-investissement restent souvent moins longtemps au capital des entreprises que les 7 ans habituellement admis dans la profession.

Combien de temps les fonds de private equity investissent-ils dans les projets ? S’il n’y a pas de durée « obligatoire », il est régulièrement admis que les fonds avec une durée de vie de 10 ans restent en moyenne 7 ans au capital des entreprises, rapporte l’Autorité des marchés financiers (AMF), dans le cadre d’opérations de capital risque, capital développement et capital transmission auprès de start-up, PME et ETI

Ça, c’est sur le papier. Dans les faits, les durées sont plus faibles. À titre d’exemple, les fonds de private equity ne sont jamais autant restés au capital des entreprises qu’en 2020 : d’après une étude publiée en avril par l’éditeur de solutions de gestion des investissements eFront, la durée moyenne était de 5,4 ans. Et cette durée, déjà inférieure aux 7 ans admis, pourrait être faussée par la crise sanitaire qui a mis qui a mis un coup de frein à l’économie, au moins à partir du mois de mars 2020. « Il n’y a eu quasiment aucune activité de fusion-acquisition durant les six mois suivants. Forcément, les fonds ont donc gardé leurs participations un peu plus longtemps en 2020 », souligne Jean-Bernard Lafonta, associé fondateur de la société de gestion HLD.

Effet Covid

L’enquête réalisée en juin 2020 par la banque d’affaires Mazars sur l’impact de la crise sanitaire sur le marché mondial du private equity vient confirmer cette fausse image d’investisseur long terme sur l’année 2020. En effet, 79% des répondants prévoyaient de retarder leur plan de cession des entreprises en portefeuille. En France, ce fut le cas par exemple pour la société de gestion française BlackFin Capital. Fin 2019, elle songeait à vendre sa participation dans le courtier spécialisé dans la santé et la prévoyance Santiane rachetée en septembre 2015 dans le cadre d’une opération de buy-out. La crise sanitaire a contrecarré les plans du General Partner, qui est resté une année supplémentaire au capital de l’entreprise. La cession n’a eu lieu qu’en décembre 2020 auprès de Latour Capital.

Des deals de moins de 4 ans

Peut-on, alors, se faire une idée de la durée moyenne d’investissement des fonds ? D’après France Invest, elle a été de 5 ans et 6 mois en 2020, révèle sa dernière étude sur la création de valeur. Un chiffre proche de celui de l’étude réalisée par eFront mais loin des 7 ans habituellement admis dans la profession. Pour Jean-Bernard Lafonta, la durée de détention est même inférieure à 5 ans. « Les fonds restent en moyenne entre 3 et 4 ans au capital des entreprises. Ils sont très normés en termes de timing. S’ils veulent relever régulièrement de nouveaux capitaux, ils sont obligés de vendre leurs actifs assez rapidement, ce qui justifie une période de détention assez courte, finalement. »

Ainsi, ces dernières années ont été témoins de nombreux deals de moins de 4 ans. Par exemple, l’accompagnement de Parquest Capital dans l’équipementier Caillau aura duré 3 ans, entre 2015 et 2018. C’est aussi le temps de la relation entre Astorg et Metrologic sur la même période. Encore plus rapide, l’investissement de Capital Croissance dans Altima n’a duré que deux ans entre 2015 et 2017. À l’époque, l’investisseur avait précisé que le projet proposé par le repreneur (Accenture Interactive) était en totale adéquation avec la stratégie de l’entreprise et ne pouvait pas être refusé. Le prix payé par Accenture Interactive combiné à une sortie rapide était surtout très intéressant en termes de rendement pour la société de gestion. Plus récemment, en juin dernier, Apax Partners cédait sa participation majoritaire dans le cabinet de conseil italien Business Intrégration Partners (Bip) à CVC Capital Partners après seulement trois ans d’accompagnement.

Tendance à la baisse

« Il y a une tendance à la baisse concernant la durée de détention des participations par les fonds de private equity, poursuit Jean-Bernard Lafonta. C’est dommage car développer la croissance d’une entreprise demande du temps. La croissance des laboratoires cosmétiques Filorga n’aurait pas été la même entre 2010 et 2019, durée de notre investissement, s’ils avaient changé trois fois d’actionnaires sur la même période ». La société a en effet été vendue au bout de 9 ans pour une valeur d’entreprise de 1,495 milliard d’euros, le chiffre d’affaires étant passé dans le même temps de 5 à 250 millions d’euros. De l’avis de Jean-Bernard Lafonta, si plusieurs fonds s’étaient succédés au capital de l’entreprise en 10 ans, les différentes stratégies auraient impacté sa croissance.  

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