L’industrie du private equity manque-t-elle de transparence ? Oliver Gottschalg, professeur associé en stratégie à HEC Paris et observateur du secteur depuis une vingtaine d’années partage son analyse.
Comment se porte le private equity aujourd’hui en France ?
Oliver Gottschalg : Alors que c’était une niche il y a encore 20 ans, le private equity s’est développé – même si cela reste une activité relativement faible de l’économie. C’est le buyout, qui consiste à racheter les capitaux propres d’une entreprise ou la majorité de ses actions et dont l’objectif est de financer une transformation d’entreprise, qui domine du point de vue des montants investis. En 2020, les 5 plus grosses opérations de buyout totalisaient plus de 1,9 milliard d’euros. De son côté, le capital-risque est très important pour la création d’entreprises et donc pour son rôle dans l’économie, mais les montants investis restent faibles.
L’industrie du private equity est parfois pointée du doigt pour son manque de transparence. Quelle est votre analyse ?
O. G. : La transparence est souhaitable dans le cas des entreprises cotées en Bourse dans la mesure où tout le monde peut y investir. En parallèle, toutes les entreprises, y compris celles du private equity, sont soumises à l’obligation de publier des bilans annuels. La question est de savoir s’il y a un intérêt public commun à connaître plus en détail ce qu’il s’y passe. Le grand public n’a pas forcément besoin d’être informé tous les trimestres. Cela étant dit, c’est dans l’intérêt de l’industrie du private equity d’aller vers plus de transparence, y compris auprès du grand public, pour montrer au moins a posteriori ce qui se passe lors de certains deals. Au bout de 5 ans, les informations n’ont plus besoin de confidentialité. En revanche, les investisseurs qui ont accès à plus d’informations ont évidemment un intérêt spécifique à comprendre ce qui se passe réellement. Je me ferai toujours l’avocat de la transparence entre les fonds de private equity et leurs investisseurs.
L’information actuellement transmise aux investisseurs vous semble-t-elle suffisante ?
O. G. : Il y a eu des progrès mais il reste des marges d’amélioration. Certaines associations, comme France Invest en France ou EMPEA au niveau mondial, travaillent à la définition de standards d’échange d’informations entre les fonds et les investisseurs, mais une partie des acteurs ne les adopte pas. C’est leur droit, dans la mesure où l’industrie est non réglementée.
Diriez-vous que la photographie autour du private equity est faussée ?
O. G. : Les débats sont toujours très idéologiques concernant le private equity. Les gens qui veulent le critiquer trouveront toujours des exemples où les opérations menées – surtout les LBO (leveraged buy-out, achat par effet de levier, ndlr.) – ont conduit à des désastres. D’un autre côté, des associations ripostent avec une cinquantaine d’exemples pour lesquels le private equity a créé de la valeur. Si je m’en tenais au fait que la discipline crée des milliardaires et tue des emplois, je détesterais le private equity ! Mais la réalité est plus complexe que cela.
Êtes-vous favorable à davantage de règlementation ?
O. G. : C’est pour moi impossible : on ne peut pas prétendre arriver à une régulation qui définirait ce qu’il est souhaitable ou non pour le private equity. En fonction des situations, certains leviers peuvent sauver une entreprise… ou la tuer. Je pense qu’il faut des contrôles, mais la discipline doit venir avant tout des investisseurs institutionnels, qui disposent des informations nécessaires pour décider de couper un fonds d’investissement de futures levées de fonds. Cette menace doit pousser les fonds à être prudents. D’où l’importance d’insister sur le besoin de transparence entre gestionnaires de fonds et investisseurs. Je trouve cela plus réaliste.
Biographie d’Oliver Gottschalg
Oliver Gottschalg, titulaire d’un diplôme d’ingénieur de l’université de Karlsruhe en Allemagne, d’un MBA de Georgia State University aux États-Unis et d’un master en management à l’INSEAD (France), est aujourd’hui responsable de la recherche chez MJH Performance Analytics. Il fait partie du département Stratégie à HEC Ecole de Management à Paris, dirige l’Observatoire HEC Private Equity et dispense des cours sur la stratégie, l’entrepreneuriat, le financement par capital-risque et le management buyout.
En tant qu’investisseur particulier (non pro) qui essaie de faire sa due diligence pour investir 100k€ sur un fonds de fonds de private equity, j’ai très peu d’éléments pour faire mon choix. Les gérants ont tous le même discours : « faites nous confiance, on a une expérience combinée de 150 ans dans le Private Equity, et nous avons choisi le meilleur du meilleur pour vous, les fonds qui ont de manière consistante sorti un tri de (au choix) 20%, 25%, 30% et ont traversé les crises ».
Je leur répond: très bien, pour les fonds que vous avez logé dans votre fonds de fonds, pouvez-vous partager avec moi le reporting des précédents millésimes de ce gérant, afin que je me rende compte par moi même.
Là c’est silence radio… ou la réponse formatée « Malgré les différents leviers mis en place, les sociétés de gestion refusent de diffuser les reportings, les données sont confidentielles pour ce type de fonds institutionnels. »
Bref, achetez les yeux fermés braves gens !
Les plaquettes marketing des fonds sont hilarantes sur ce point. On y voit par exemple des affirmations du genre: « 3.4x Multiple Brut réalisé sur 48 sorties. » So what ?? Si comme si je disais: ma fille a eu au collège plus de 30 fois une note supérieure à 18/20. Et alors ? Ca ne prouve rien. Ca ne va pas divulguer qu’elle a fait une mauvaise année de 5ème.
Je pense qu’il va y avoir de nombreuses déconvenues avec la démocratisation du Private Equity auprès de particuliers. Plus de transparence serait la bien venue en effet.