Face à l’augmentation des prix de l’énergie, les TPE et PME ont du mal à faire face. « On prend cette hausse de plein fouet ! On ne peut pas la répercuter sur nos prix de marché puisqu’on a déjà signé les devis, donc on va voir nos marges baisser, c’est automatique » s’alarme Bénédicte Caron, cheffe d’entreprise dans l’agroalimentaire et vice-présidente en charge des affaires économiques à la CPME, la confédération des TPE et PME. En effet, depuis janvier 2021, les prix du gaz ont bondi de 59%, l’électricité a augmenté de 2% et le prix du carburant est passé de 1,33€ le litre en septembre 2020 à 1,59€ le litre… Une hausse record en Europe, puisqu’à titre de comparaison le prix du litre de pétrole s’élevait à 1,53€ avant la crise des Gilets jaunes.
Cette flambée des prix est due à la reprise économique brutale post-Covid qui a provoqué un choc de la demande – trop de demandes par rapport à l’offre disponible – et à des tensions géopolitiques avec certains pays producteurs. « Au niveau des énergies carbonées, comme le pétrole et le gaz, nous sommes obligés d’importer : nous sommes donc fortement dépendants des pays tiers. Au printemps dernier, l’OPEP+ s’est mis à ralentir la production de pétrole pour faire monter les prix – le baril avait atteint son plus bas niveau pendant le premier confinement – ce qui a créé des tensions. Petit à petit ils ont rouvert les vannes. Mais aujourd’hui, c’est la Russie qui est accusée de fournir moins de gaz », analyse Carine Sebi, professeure et coordinatrice de la chaire Énergie for Society à Grenoble École de Management.
Résultat : les petites entreprises sont particulièrement touchées. « Les grandes entreprises ont souvent des résultats qui font que la facture d’énergie pèse un faible pourcentage sur le chiffre d’affaires, mais pour une TPE ou une PME une augmentation de 300 ou 500€ est un vrai problème », souligne Bénédicte Caron.
Petites économies
Tous les secteurs d’activité ne sont pas également impactés. Les boutiques de vêtements qui, à part pour éclairer leur magasin, n’ont pas de gros besoins en énergie sont par exemple moins concernées que des services d’aide à la personne ou de livraison à domicile, où la hausse des prix des carburants se fait particulièrement ressentir. À court terme, certaines entreprises, notamment de sous-traitance, risquent le dépôt de bilan… Pour celles qui ont contracté des prêts garantis par l’État (PGE), la situation est aussi très délicate. « Beaucoup de TPE et de PME ont besoin de faire deux ou trois belles années économiquement parlant pour rembourser les PGE, et ce n’est pas la hausse des prix qui va leur faciliter la tâche », explique Bénédicte Caron.
Pour faire face, les petites et moyennes entreprises tentent, comme les particuliers, de diminuer leur consommation d’électricité. « On a tous conscience que c’est dans cette direction qu’il faut aller, donc on essaie de trouver des moyens alternatifs comme passer à la voiture hybride pour consommer moins de carburant, réguler l’électricité… mais c’est vraiment quelque chose que les entreprises subissent : on ne peut pas faire grand-chose à part de petites économies », regrette la vice-présidente de la CPME.
La crise devrait se résoudre d’elle-même lorsque les entreprises auront reconstitué leurs stocks, mais les chefs d’entreprise se préoccupent de la dépendance à certains composants. « Je pense que certaines matières, comme les terres rares, vont rester sous tension, et je ne serai pas étonnée que cela devienne un problème quand on va devoir produire en série des véhicules électriques », s’inquiète Agnés Damette, présidente de Logitrade, une entreprise de logistique.