Avant toute chose, définissons la souveraineté numérique. Elle concerne la capacité d’un État à contrôler son cyberespace et ses acteurs – politiques, économiques, sociaux, etc. – ainsi que ses citoyens à disposer d’outils numériques leur garantissant la confidentialité et la possession de leurs données. Or, aujourd’hui, en France, ce n’est pas acquis.
Indépendance et compétitivité
En France, institutions et administrations publiques, sociétés privées et individus utilisent très majoritairement les services de Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft (GAFAM). Cela concerne les téléphones, les matériels informatiques, les logiciels professionnels, les solutions d’hébergement de données en ligne, etc.
Pourquoi vouloir, à l’heure de la mondialisation, s’affranchir des services performants et bon marché d’entreprises plébiscitées par les acteurs de marchés ? Il y a deux raisons principales : l’indépendance et la compétitivité.
Fortement dépendants de ces géants étrangers surpuissants, notre pays ressemble à une colonie et nous, entrepreneurs, ne sommes pas, par conséquent, réellement indépendants, mais colonisés – il faut avoir le courage de l’écrire.
En effet, en confiant nos données aux géants de la Silicon Valley, celles-ci sont de facto soumises aux règles de l’extraterritorialité américaine. Or la législation des États-Unis, le Cloud Act, autorise l’État fédéral à prendre connaissance de ces données quel que soit le lieu où elles sont hébergées dans le monde et sans que les clients et les utilisateurs en soient informés. Tout individu, qu’il agisse dans un cadre professionnel ou privé, voit donc ses données privées pillées, au mépris du « droit de chaque individu à préserver sa vie privée ». Par conséquent, les GAFAM connaissent tout de ses centres d’intérêts et de ses opinions politiques. Quant aux PME utilisant ces services, logées à la même enseigne, elles ne sont pas totalement autonomes ; une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de leurs activités qui a pour nom l’intérêt supérieur des États-Unis.
Il ne faut pas être naïf : en confiant ses données aux GAFAM, une PME se met entre les mains d’un fournisseur qui peut à tout moment se retourner contre elle sans qu’elle ait la moindre capacité de se défendre réellement.
Choisir de protéger sa souveraineté
Pourtant, il existe déjà des solutions fiables et robustes ; ce sont les technologies françaises ou européennes respectueuses des données. Il faut simplement faire l’effort de les chercher, de les sélectionner et de décider de s’affranchir des GAFAM. Quant aux avantages immédiats, ils sont de deux ordres : rester maître chez soi et être mieux servi.
En effet, en faisant le choix de protéger sa souveraineté, cela permet de contrôler son développement et de préserver son indépendance. Parce que les entreprises européennes ne sont pas soumises au Cloud Act, mais au Règlement général sur la protection des données européen – le RGPD. Très protecteur, il permet de beaucoup mieux protéger vos données, celles de vos collaborateurs et celles de vos clients. Quelle que soit leur taille, c’est un enjeu vital pour les entreprises, notamment pour celles qui opèrent dans les secteurs stratégiques comme la défense ou l’industrie pharmaceutique. C’est également le cas pour toutes celles qui veulent se protéger de l’espionnage industriel, qui déposent des brevets ou ont des savoir-faire rares.
Par ailleurs, en utilisant des solutions européennes, vous serez mieux servis. Grâce à la proximité, votre fournisseur sera plus réactif et certainement plus à l’écoute pour faire du sur-mesure, ce qui ne peut pas être le cas des géants californiens. En outre, bénéficier d’une assistance et d’un support client en langue française est précieux : cela permet de mieux se faire comprendre pour, finalement, avoir un réel traitement de ses besoins propres.
Il faut donc le rappeler, les PME, comme les particuliers, peuvent travailler et vivre sans les GAFAM. In fine, en faisant appel à des prestataires français ou européens, c’est faire d’une pierre trois coups : c’est poser un acte qui renforce la souveraineté numérique de son entreprise, renforcer son indépendance et augmenter sa productivité grâce à la proximité avec ses fournisseurs.
Thomas Fauré (Whaller)
Thomas Fauré est ingénieur (Centrale Lille). Il y a quelques années, alors que son beau-frère lui posait la question de savoir s’il devait ou non laisser son fils s’inscrire sur Facebook, Thomas Fauré se mit en tête d’agir plutôt que de commenter. Il coda et développa Whaller : un réseau qui incarne sa vision des réseaux sociaux. D’abord ingénieur chez Safran, passionné de code et de biométrie, il rejoint Polyconseil (Groupe Bolloré) en 2011, où il évoqua sa passion d’entreprendre et ses projets jusqu’à convaincre Vincent Bolloré d’investir dans Whaller. La start-up est née en 2013. Elle compte déjà plus de 175 000 utilisateurs pour environ 8 000 réseaux hébergés.