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Jean-Baptiste Descroix-Vernier : « L’éthique doit être le point de départ pour tous les secteurs »

Jean-Baptiste Descroix-Vernier
© Dominik Fusina

Le prix Descroix-Vernier EthicScience récompense les meilleures avancées scientifiques en matière de recherche non-animale. De quoi mettre en avant l’importance de l’éthique dans l’innovation, et de raviver les questions sur le rôle du législatif en la matière.

Difficile de présenter Jean-Baptiste Descroix-Vernier. Homme d’affaires, philanthrope, humanitaire… il multiplie les casquettes tout en veillant à rester discret. Aujourd’hui, le prix EthicScience lui rend hommage en se rebaptisant « prix Descroix-Vernier EthicScience ». Celui-ci sera remis à plusieurs lauréats le 2 février 2023. Les programmes les plus avancés en matière de recherche non-animale se partageront 110  000 euros de dotation. L’occasion d’une rencontre autour de l’importance de l’éthique dans la recherche, du rôle des acteurs privés et publics sur le sujet, et de souligner que les alternatives, lorsqu’elles existent, doivent devenir la norme.

Interview.

Pourquoi était-il important pour vous de rapprocher votre fondation du prix EthicScience ?

Jean-Baptiste Descroix-Vernier : Le prix a été créé il y a plus de 10 ans par l’ONG Pro Anima – ce qui signifie « pour l’âme ». Comme ma fondation, elle est soutenue par des gens très discrets, mais très actifs et efficaces. Nous avons, culturellement, de nombreuses choses en commun. Ce prix s’inscrit dans le cadre d’une relation de longue date. Ce nouveau nom est une reconnaissance, un hommage qui me touche beaucoup.   

Quels sont les types de programmes soumis au prix ?

J.-B. D.-V. : Il s’agit d’innovations scientifiques très pointues. Par exemple, un programme de bioimpression de tissus humains. C’est révolutionnaire : c’est plus éthique, mais aussi bien plus fiable, que de tester un produit sur un animal non-humain. Nous avons aussi vu un programme qui permet de cultiver des tissus humains. C’est fascinant de voir qu’un muscle entier peut sortir d’une éprouvette. On nous a également présenté un programme sur la modélisation de tumeurs cancéreuses. Nous ne sommes pas là pour interdire sans proposer d’alternatives, mais pour mettre en lumière de nouvelles solutions. Nous voulons récompenser, pas stigmatiser.

Ce prix doit-il pallier le manque de financements publics sur la question ?

J.-B. D.-V. : C’est vrai que la recherche, en France, n’est pas suffisamment financée. Ce n’est pas la première fois qu’un fonds privé doit pallier les carences politiques. Nous le voyons dans de nombreux domaines ! Je suis très actif auprès des personnes sans-domicile. Les 3 derniers présidents français se sont engagés à éradiquer la misère, certains en ont même fait un argument de campagne. Force est de constater que les engagements ne sont pas à la hauteur des promesses. Concernant les objectifs du prix, je dirais qu’ils sont triples. Premièrement, il s’agit d’un outil de lobbying. C’est un prix très prestigieux, remis au Cercle de l’Union Interallié, en présence de grands laboratoires, d’entreprises et de scientifiques. Son deuxième objectif est pédagogique. Il doit faire parler du sujet dans les médias et dans le secteur. Enfin, il y a bien un objectif économique : c’est le prix le plus doté financièrement. Nous ne sommes pas là pour faire joli, mais pour aider réellement les scientifiques qui sont, pour la plupart, dans cette quête d’éthique.

D’un côté les scientifiques sont en quête d’éthique, de l’autre la recherche non-animale n’est pas toujours considérée par les organismes concernés. Pourquoi ?

J.-B. D.-V. : Les contraintes économiques qui pèsent sur la recherche sont énormes. Les budgets sont compliqués à boucler, et les grands acteurs préfèrent parfois privilégier ce qu’ils connaissent à l’adoption des nouvelles procédures. Pourtant, j’insiste : s’il existe, pour un produit donné, une procédure qui permet d’éviter les tests sur les animaux, il est irresponsable de ne pas la choisir. On le voit d’ailleurs dans les réactions du grand public. Un laboratoire ou une marque de cosmétiques qui se fera épingler sur le sujet risque une vague de boycotts. C’est le sens de l’Histoire !  

Faut-il légiférer sur le sujet ?

J.-B. D.-V. : Il existe déjà des textes de loi. Une directive européenne, de 1986 – entrée en vigueur en France seulement en 2013… – exige que lorsqu’une solution alternative existe, les tests sur les animaux soient bannis. La question, désormais, reste de faire respecter les directives et arrêtés qui existent.

Le prix confirme la trajectoire de votre parcours, guidé par l’éthique. Pourquoi l’avoir choisie comme boussole ?

J.-B. D.-V. : C’est la valeur la plus importante, le plus petit dénominateur qui doit être commun à tous les secteurs. C’est mon rôle, lorsque je siège à un conseil d’administration, d’apporter une vision et des conseils éthiques. C’est parfois un peu « touchy » en entreprise, parce que l’on touche à la frontière de la morale, mais il est important que les acteurs privés s’emparent de la question.

Biographie

Après avoir obtenu son diplôme d’avocat, Jean-Baptiste Descroix-Vernier fonde Rentabiliweb, entreprise spécialisée dans la mise en place de solutions de micropaiement puis de paiement en ligne dédié au e-commerce. En 2006, l’entreprise se cote en bourse. En 2005, il crée la Fondation Descroix-Vernier dont le but est de financer des programmes caritatifs pour les vies les plus menacées (humaines et animales) ainsi que les causes environnementales. En 2011, il forme le premier Conseil National du Numérique à la demande du président de la République. Il en devient vice-président, chargé de la commission des libertés et de la protection de l’enfance. En mars 2016, lors d’une mission humanitaire en Afrique subsaharienne, il contracte une souche rare de la malaria. Il survit de justesse après une longue hospitalisation. Il quitte quelque temps après la présidence de Rentabiliweb, devenue Dalenys et accepte l’OPA lancée par le groupe BPCE sur sa société. La même année, il décide de se retirer du monde des affaires. Aujourd’hui, Jean-Baptiste Descroix-Vernier vit entre Amsterdam et la Dombes. Il continue le combat aux côtés des associations et des ONG de terrain avec son épouse et son équipe de bénévoles.

Mélanie Roosen & Géraldine Russell

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